Du 27 avril au 4 mai 2015, les Archives ont été invitées à exposer dans la Chapelle Vidéo attenante au Musée d’Art et d’Histoire de Saint-Denis, dans le cadre d’une exposition intitulée « Or il fût un temps passé ou le futur était présent ». À cette occasion nous avons repris trois chantiers en cours pour en proposer une présentation qui mêlait sons d’origine ou fabriqués pour l’occasion, images animées et fixées par la sérigraphie, et documents. Sous la forme de trois tables, nous avons donc invité dans l’exposition l’affaire Hurst (Saint-Denis 1972), Radio Alice (Bologne, 77) et le Collectif Mohamed (banlieue sud, 1980). Nous aimerions trouver le moyen de faire vivre autrement ces éléments, en les déplaçant et en les adaptant à d’autres lieux ou circonstances, ensemble ou séparés, sous forme d’exposition ou en accompagnement d’autres initiatives. Reproposer l’exposition en l’état demanderait la fabrication des trois structures pour les tables et du matériel audio et vidéo (5 vidéo-projecteurs, 8 points d’écoute son, et des casques, 1 rétroprojecteur). Nous réfléchissons à d’autres formes, plus légères, de présentation et toute proposition sera bienvenue.
Au bas de cette page, quelques photos restituent des éléments de l’exposition, de quelques affichages, et de sa fabrication.
Pour se figurer notre participation à cette exposition il est possible, à certains égards, de l’imaginer comme une poupée russe.
Work method est invité à organiser une exposition à La Chapelle Vidéo, attenant au Musée d’Art et d’Histoire de St Denis, Work method invite les Archives Getaway, et les Archives, à leur tour, invitent trois histoires, fruits de trois espace temps différents, trois propositions politiques face à leur époque. Chacune sera l’hôte d’une table.
Les histoires dont chacun trouvera là des bribes, sont à prendre comme autant d’invitations à réfléchir, à nourrir les imaginaires critiques, permettant ainsi, nous l’espérons, de retrouver quelque chose à extraire de ces veines subversives enfouies.
Si ces trois histoires ont été choisies c’est parce qu’au-delà du fait qu’on peut y lire qu’un communisme s’affronte à un autre, dans des contextes et des lieux divers, elles contiennent une charge subversive particulière dont on a cherché à faire entendre ici, maintenant, en direction du futur, quelques échos.
Les Archives invitent l’Affaire Hurst et Libérons l’Ecole, au croisement des luttes sur les questions pédagogique et des mobilisations de scolarisés. Parce que cette histoire est celle d’un refus d’obéir aux injonctions administratives, porté par une autre conception de l’enseignement et du rapport à l’enfance : Jean-Louis Hurst prenait ses élèves très au sérieux. Faire rentrer la vie dans l’école, en sortir avec les élèves et laisser se tisser d’autres liens, parler d’autres choses, enregistrer, filmer, puis écrire, protester, contester, manifester : les principaux acteurs de cette mobilisation contre la mutation de leur prof sont ses élèves de 6ème. Les prendre très au sérieux, c’est d’abord entendre cette mobilisation.
Les Archives invitent le Collectif Mohamed dans l’intention de prolonger la prise de parole de ce collectif. Leurs films, Ils ont tué Kader et Zone immigrée dont un extrait est présent dans le JT, la parole de Mustapha invité du JT, mais aussi l’entretien réalisé par Touati et l’article de Mohamed dans Tumulte, font entendre une exigence d’autonomie politique et pratique et déjouent les stéréotypes et les attentes des amateurs de scandales ou de victimes. Contre la judiciarisation, contre le travail, pour faire entendre la réalité de la vie, des pratiques, des difficultés et des aspirations de ces jeunes, enfants des travailleurs immigrés qui sont passés dans les années 70 des bidonvilles aux cités.
Les Archives invitent Radio Alice, comme ambassadeur des Radios Libres, en espérant que quelque chose de la situation révolutionnaire de l’Italie des années 70 soit aussi au rendez-vous. « Per l’Autonomia, per il communismo » : Bologne 77 et le foisonnement subversif qui y prend place invente des modes d’énonciation et conteste au PC le monopole du communisme, à l’État et ses agents le monopole de la violence. Comme en relai, en fidélité et à sa manière, la proposition des Archives conteste à l’université et aux institutions d’État le monopole de l’écriture de l’histoire.
Aujourd’hui, alors que l’hypothèse révolutionnaire n’est pas au mieux de sa forme, qu’elle semble étouffée et désarmée, il nous importe de créer des occasions de percevoir que d’autres passés sont possible, qu’ils sont déjà là, comme en embuscade. Reste à choisir alliés et tactiques. La cavalerie est là, prête ; depuis longtemps les renforts sont en place, parfois sous la poussière. Il nous revient de réfléchir à ce que nous en faisons et de travailler à un futur qui puise ses ressources dans un passé plus riche et prometteur, contre la linéarité pacifiée d’un lisse présent sans fin.
Exposer ici, c’est, sous une forme inédite pour nous, expérimentale en quelque sorte, aider à varier les modes possibles de réceptions, et chercher, ici comme ailleurs, à travailler quelque chose d’un imaginaire collectif puissant et subversif.
Nous tenons à remercier chaleureusement ici ceux qui, de différentes manières, nous ont aidés dans notre travail. Ceux qui nous ont accueillis avec gentillesse et bienveillance, ont répondus à nos questions, nous ont données temps et documents. Que ceux qui ont pris la peine de venir ici soient remerciés également. Pour terminer, un remerciement appuyé à ceux qui sauront exploiter subversivement ce qui est présenté dans le cadre de cette exposition.
Archives Getaway
Mars 2015